Observons un élève moyen de CM pendant qu'il pose la division ci-contre.
L'étape où il est parvenu comporte un très grand risque d'erreur.
À ce stade, de nombreux élèves tiendront un discours proche de ceci :
"21 c'est plus petit que 27, alors je prends trois chiffres, j'abaisse le 5 et je me demande en 215 combien de fois 27".
Le quotient trouvé sera alors de 37 et non 307.
Nous vous proposons ci-dessous deux façons de se raconter la technique de division qui diminuent ce risque d'erreur en supprimant deux phases magiques de la façon traditionnelle de dire la division :
"27 a deux chiffres, alors je prends les deux premiers chiffres de 8315 (et si c'était plus petit que 27, je prendrais les trois premiers)".
"…et j'abaisse le 1…"
Cette technique est proposée dans de bons manuels de mathématique pour le cycle 3, "Cap Maths" et "J'apprends les maths" entre autres.
Voici comment on dit la division de 8315 par 27 dans cette méthode, nous en détaillerons plus loin les avantages et les limites.
Diviser 8315 par 27, ça revient à partager 8315 billes entre 27 enfants (en donnant autant de billes à chaque enfant).
Combien chaque enfant aura-t-il de billes ?
Je commence par essayer de partager des paquets de 1000 billes.
8315 billes, c'est 8 paquets de 1000 billes et 315 autres billes.
Il n'y a pas assez de paquets de 1000 billes pour en donner à chaque enfant.
Je casse donc tous les paquets de 1000 billes pour obtenir des paquets de 100 billes.
8315 billes, c'est 80 paquets de 100 billes, et 315 autres billes. Avec ces 315 billes, je peux encore faire 3 paquets de 100 billes.
8315 billes, c'est donc 83 paquets de 100 billes et 15 billes isolées (si on sait directement interpréter 8315 comme 83 centaines et 15 unités…on va plus vite).
83, c'est plus que 27, je pourrai donner des paquets de 100 billes à chaque enfant.
Le nombre de billes que recevra chaque enfant aura alors un chiffre des centaines, je peux préparer mon quotient en écrivant c d u (pour centaines, dizaines, unités).
Combien de centaines de billes puis-je donner à chaque enfant ?
27 fois 2 c'est 54, 27 fois trois c'est 81. Je peux donner 3 centaines à chacun.
J'écris "3" dans la colonne des centaines, et je soustrais les 81 centaines distribuées des 83 centaines que j'avais au départ.
Il me reste 2 centaines, je ne peux plus en distribuer, alors je les transforme en 20 dizaines.
Je n'oublie pas qu'il y a aussi une dizaine dans les 15 billes qui n'étaient pas groupées par centaines.
J'ai donc en tout 21 dizaines à partager, ce n'est pas assez pour en donner une à chaque enfant.
Le chiffre des dizaines du quotient sera donc 0.
Comme je ne peux pas donner de dizaine à chaque enfant, je transforme les 21 dizaines en 210 unités, et j'ajoute les 5 unités isolées, j'ai donc 215 unités (ou 215 billes si l'on préfère) à partager.
27 fois 4 c'est 108
27 fois 8 c'est le double, c'est 216, c'est un tout petit peu trop grand, je pourrai donner seulement 7 billes à chaque enfant.
J'écris 7 comme chiffre des unités du quotient.
27 fois 7, c'est 189.
Je pose la soustraction pour savoir combien de billes non distribuées il reste. (Dans le cas particulier de cette division, on pourrait se passer de poser cette soustraction : on a remarqué plus haut qu'avec une bille de plus on pourrait donner une bille supplémentaire à chaque enfant, c'est donc qu'il reste 26 billes, mais la plupart des élèves ne le verront pas).
On conclut donc que chacun des 27 enfants aura 307 billes et qu'il restera 26 billes non partagées.
Pour finir, mais ceci est commun à toutes les méthodes de division, il est préférable de vérifier en posant la multiplication qu'on a bien :
Ce qui revient à dire qu'avec les 27 parts de 307 billes chacune plus les 26 billes qui ne sont pas distribuées, on retrouve bien les 8315 billes qu'on avait au début.
Comme pour toute méthode, certaines variations sont possibles, par exemple :
Les dessins des paquets de différentes tailles (1000, 100, 10) sont utiles au début, mais ils alourdissent considérablement l'écriture. On vise à s'en passer dès que possible. Les multiplications peuvent être posées à côté quand elles sont trop difficiles à faire de tête (ce qui dépend évidemment de l'élève). Certains tracent un petit arc au-dessus de 83 pour mieux retenir que l'étape en cours consiste à partager les 83 centaines. L'écriture des retenues dans les soustractions est nécessaire pour la plupart des élèves, nous ne les avons pas écrites dans l'exemple, car les méthodes de soustraction sont elles-mêmes variées : chacun posera les retenues de soustraction comme il en a l'habitude. Certains préfèrent prévoir un chiffre des milliers au quotient (il y a 8 milliers qu'on cherche à partager) et écrivent dont d'entrée m c d u … quitte à constater que le chiffre des milliers est zéro et qu'on peut ne pas l'écrire. Nous n'en voyons pas bien l'utilité, mais ça ne compromet en rien la méthode. Les principaux avantages de cette méthode :
Elle s'appuie massivement sur la compréhension du système décimal de position et les différentes décompositions possibles d'un nombre à partir de son écriture dans ce système. On peut juger cela difficile, mais le travail ainsi fait à chaque division sur l'écriture décimale des nombres est sans aucun doute plus profitable que les rituelles questions "Quel est le chiffre des centaines de 8315 ?" et "Quel est ne nombre de centaines dans 8315 ?"
Chaque étape a une signification dans l'histoire qu'on se raconte, les étapes magiques du type "et j'abaisse le 1" ont disparu. En particulier, quand on écrit un chiffre au quotient, on sait s'il s'agit de centaines de dizaines ou d'unités. C'est ce qui contribue à rendre moins fréquente l'erreur décrite au début de cette page. Dans certaines méthodes, on écrit les chiffres sans savoir du tout ce qu'ils représentent, on découvre seulement à la fin que le 3, premier chiffre du quotient, est le chiffre des centaines.
La trace écrite est pratiquement identique à celle de la méthode qui était la plus fréquente il y a 20 ou 30 ans, ce qui contribue à rassurer les parents… mais il n'est pas absolument certain que ce soit un avantage : comme il y a peu de différences à l'écrit, les parents, pour aider leurs enfants vont décrire la division telle qu'ils l'ont apprise. L'élève risque alors d'être confronté à deux discours radicalement différents pour décrire la même opération. Une information des parents s'impose certainement. Limites et inconvénients de cette méthode :
Cette méthode s'appuie fortement sur la signification "partager 8315 billes entre 27 personnes" or, en restant dans le contexte des billes, la même division sert aussi à trouver combien on peut faire de paquets de 27 billes avec 8315 billes. La méthode manque de souplesse de ce point de vue, et ne peut pas se décrire en s'appuyant sur la signification "combien de paquets". Cela gênera certains élèves qui hésiteront à employer une méthode reposant sur la recherche de la valeur d'une part dans les problèmes où on cherche le nombre de groupements qu'on peut réaliser.
Quand le diviseur est du même ordre de grandeur que le diviseur, par exemple pour effectuer 3419 par 817, si on suit strictement la procédure décrite ci-dessus, on arrive à un discours très lourd et qui apporte peu : pour partager 3419 billes entre 817 enfants, je ne peux donner ni millier, ni centaine, ni dizaine, il faut donc partager les 3419 billes entre les 817 enfants…belle lapalissade. On est alors conduit à essayer les produits de 817 par différents nombres à 1 chiffre… comme avec les autres méthodes.
Cette technique se décline en deux sous-versions…suivant le problème qu'on se pose.
Si on cherche à déterminer combien de billes aura chaque enfant dans un partage de 8315 billes entre 27 enfants, toutes les multiplications seront dites sous la forme "vingt-sept fois nnnnnn".
Si on cherche à trouver combien de paquets de 27 billes on peut faire avec 8315 billes, on dira plutôt "nnnnnn fois vingt-sept".
C'est pourquoi la suite comporte deux transcriptions du discours tenu en posant l'opération, de part et d'autre d'une trace écrite commune. (Une page sur l'usage du mot "fois" est à venir).
Si on cherche combien de paquets on peut faire.
10 fois 27 c'est 270, c'est moins que 8315, on peut faire plus de 10 paquets.
100 fois 27 c'est 2700, c'est moins que 8315, on peut faire plus de 100 paquets.
1000 fois 27 c'est 27000, c'est plus que 8315, on ne peut pas faire 1000 paquets.
Je sais que le nombre de paquets que l'on pourra faire est au moins 100, mais plus petit que 1000.
Je cherche maintenant si on peut faire 200, 300, 400… paquets.
Si on cherche la part de chaque enfant.
27 fois 10 c'est 270, c'est moins que 8315, on peut donner plus de 10 billes à chaque enfant.
27 fois 100 c'est 2700, c'est moins que 8315, on peut donner plus de 100 billes à chaque enfant.
27 fois 1000 c'est 27000, c'est plus que 8315, on ne peut pas donner 1000 billes à chaque enfant.
Je sais que le nombre de billes pour chaque enfant est au moins 100, mais plus petit que 1000.
Je cherche maintenant si on peut donner 200, 300, 400…billes à chaque enfant.
Comme 2 fois 27 font 54, 200 fois 27 font 5400, on peut faire 200 paquets.
Comme 3 fois 27 font 81, 300 fois 27 font 8100, on peut faire 300 paquets.
Comme 4 fois 27 font 108, 400 fois 27 font 10800, on ne peut pas faire 400 paquets.
J'écris qu'on fait 300 paquets et je calcule combien il reste de billes.
Comme 27 fois 2 font 54, 27 fois 200 font 5400, on peut donner 200 billes à chaque enfant.
Comme 27 fois 3 font 81, 27 fois 300 font 8100, on peut donner 300 billes à chaque enfant.
Comme 27 fois 4 font 108, 27 fois 400 font 10800, on ne peut pas donner 400 billes à chaque enfant.
J'écris que chaque enfant a 300 billes et je calcule combien il reste de billes.
Il reste 215 billes, en regardant les tables écrites, je constate qu'on peut encore donner 7 billes à chaque enfant, mais qu'on ne peut pas en donner 8.
J'écris qu'on donne encore 7 billes à chaque enfant puis je calcule le nombre total de billes pour chaque enfant et le nombre de billes restantes.
Il reste à vérifier que 27 fois 307billes, plus les 26 billes restantes, cela fait bien 8315 billes.
Il reste 215 billes, en regardant les tables écrites, je constate qu'on peut encore faire 7 paquets, mais pas 8.
J'écris qu'on fait encore 7 paquets puis je calule le nombre total de paquets et le nombre de billes restantes.
Il reste à vérifier que 307 fois 27 billes, plus les 26 billes restantes, cela fait bien 8315 billes
On peut chercher à alléger les écritures. Il est par exemple possible de traiter mentalement les multiplications par 10, 100, 1000. On peut aussi n'écrire que les produits nécessaires et difficiles à effectuer de tête dans la table de 27 On peut comme dans la méthode précédente écrire "c d u" dans la zone du quotient et n'écrire que le chiffre 3 dans la colonne des centaines pour signifier qu'on a donné 300 billes à chaque enfant (ou qu'on a fait 300 paquets). Les principaux avantages de cette méthode :
Elle se décrit facilement conformément au problème posé, que l'on cherche la valeur d'une part ou le nombre de groupements possibles. La conviction que la même opération est légitime pour ces deux types de problèmes qui semblent a priori différents en est renforcée.
Comme pour la méthode précédente, chaque étape a une signification dans l'histoire qu'on se raconte, les étapes magiques du type "et j'abaisse le 1" ont disparu.
La méthode est en partie autocorrective : si un des chiffres du quotient est sous-estimé cela n'affecte pas le résultat final comme le montre l'exemple ci-dessous. On remarque que le deuxième aménagement proposé plus haut a pour effet de faire perdre ce caractère autocorrectif.
Limites et inconvénients de cette méthode :
Les traces écrites sont lourdes. On peut évidemment ne pas écrire toutes les multiplications, mais si on n'écrit pas la table de 27, les opérations mentales sont plus complexes que dans d'autres méthodes : il ne suffit pas de calculer 4 x 27 ou 5 x 27, il faut en déduire 400 x 27 ou 500 x 27. Le faire entièrement de tête est très formateur pour ceux qui en sont capables, mais risque de mettre en difficulté d'autres élèves.
La trace écrite s'éloigne de celle que les parents d'élèves ont pu connaître ce qui demandera quelques explications. On peut aussi voir cette différence comme un atout : elle signale que la méthode est différente, le risque de plaquer sur le même écrit deux discours radicalement différents à l'école et à la maison est moindre qu'avec la première méthode. On peut supprimer cette différence d'aspect en utilisant le deuxième aménagement proposé ci-dessus, mais on perd alors l'aspect autocorrectif de la technique.